Bertrand Labilloy, PDG de CCR Re et DG de CCR

« En cinq ans, CCR Re a doublé la taille de son portefeuille et augmenté sa rentabilité »

Publié le 8 décembre 2022 à 9h00

Juliette Lerond-Dupuy et Louis Johen

Bertrand Labilloy partage ses ambitions sur fond d’augmentation de capital et de renouvellements des traités de réassurance. Retrouvez l’intégralité de cette interview dans le n°285 de La Tribune de l’assurance de décembre 2022.

Propos recueillis par Louis Johen

Quelles sont les lignes en croissance pour CCR Re en 2022 ?

À la création de CCR Re en 2016, nous avions un portefeuille d’activité avec une forte granularité et un poids fort des risques longs. Nous devions avoir un profil de risque très « diversifiant » par rapport à l’activité Cat Nat de CCR. Depuis que nous sommes devenus une filiale, nous nous sommes diversifiés et avons réduit le poids de la RC et RC auto. J’estimais alors que ces risques étaient mal rémunérés dans un environnement de taux bas. Et nous avons effectué un rééquilibrage au profit des risques dommages et Cat. Nous avons par ailleurs développé l’activité vie-santé. En travaillant avec nos clients existants, en leur proposant des couvertures pour l’ensemble de la gamme de risques et pas uniquement sur les risques longs, en travaillant « en travers », nous avons pu développer l’activité. Nous avons réalisé 15 % de croissance annuelle depuis les cinq dernières années. Un autre levier a été de proposer des capacités Cat plus importantes, ce qui nous a permis d’augmenter nos parts prises sur les traités et d’alimenter la croissance du portefeuille. Deux tiers de la croissance vient de cette montée en gamme sur les programmes de réassurance de nos clients.

Quelles sont vos ambitions ?

Nous allons continuer à rééquilibrer notre portefeuille. Dans le cadre de l’ouverture du capital de CCR Re, nous allons augmenter les capacités Cat et sûrement nous réengager sur les risques longs dans l’environnement de taux d’intérêt plus élevés. La structure de notre bilan actuel se comporte bien grâce à l’écart de duration entre notre passif (huit ans) et notre actif obligataire (trois ans). Nous visons par ailleurs le juste équilibre entre les risques Cat, de court terme et volatiles et les risques longs, plus pilotables.

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre plan d’affaires 2027 ?

En cinq ans, nous avons doublé la taille du portefeuille et augmenté la rentabilité de nos fonds propres de 300 points de base. L’objectif pour les cinq années à venir est de faire exactement la même chose et dans les mêmes proportions. Pour l’heure, nous n’avons ni la taille critique pour cette activité globale qui nécessite d’avoir un poids financier important, ni la rentabilité qui nous permet d’autofinancer une croissance au rythme du marché de la réassurance, c’est-à-dire de l’ordre de 9 %. Nous avons quantifié le besoin de capital global pour financer cette croissance sur les cinq prochaines années à près de 400 M€. Nous avons prévu d’en financer une partie par une augmentation de capital de l’ordre de 200 M€, qui justifie l’ouverture de notre capital.

Pourquoi ouvrir le capital aujourd’hui ?

Entre 2017 et 2022, qui correspond à la première phase de notre plan de croissance, nous avons bénéficié de l’augmentation de capital initiale, de la création de notre « sidecar » et de l’émission de 300 M€ de dette subordonnée. Il faut maintenant financer la deuxième phase de notre plan. Nous avons un ratio de solvabilité de 200 % que nous pouvons maintenir sur 2022 et 2023, mais nous avons besoin de renforcer nos capacités financières pour aller au-delà. L’opération d’ouverture de capital est d’autant plus bienvenue que l’environnement de marché est très favorable avec des hausses de taux significatives qui se profilent à l’occasion des renouvellements du 1er janvier, très au-delà de ce que nous avons pu connaître ces dernières années.

Comment allez-vous profiter de ces hausses de tarifs ?

Nous allons enfin retrouver un environnement de tarifs plus équilibré après une décennie de baisse. Même si nous avons observé un frémissement des prix ces dernières années, la rentabilité des réassureurs n’est, de manière générale, pas au niveau du coût du capital. Elle est même, dans certains cas, inférieure à la rentabilité des assureurs directs, ce qui est assez original. Cette situation ne pouvait pas durer et CCR Re, qui sort de l’année avec un bilan renforcé et la perspective d’un renforcement de sa base capitalistique, est parfaitement positionné pour profiter de ces renouvellements.

Comment avez-vous modernisé la plate-forme CCR Re depuis cinq ans ?

Notre projet d’entreprise passe par le développement d’une plate-forme internationale opérant depuis Paris et nous avons réalisé un important travail de refonte de nos processus. Cela comprend la modernisation de nos systèmes d’information avec l’intégration d’outils d’intelligence artificielle qui permettent l’automatisation d’un certain nombre de tâches de gestion. La revue de nos processus a d’ailleurs contribué à la rentabilité technique de CCR Re puisque nous affichons un ratio de frais inférieur à 5 % qui nous positionne bien par rapport au marché. Ce programme va se poursuivre dans les années à venir avec un plan de déploiement de nouvelles technologies fixé pour cinq ans. Nous espérons encore gagner en efficacité mais également avoir la capacité de tirer le meilleur parti des données que nous collectons. Nous avons également beaucoup modernisé notre chaîne de cotation et de gestion des risques Cat Nat. Ces dernières années, nous avons enfin beaucoup renouvelé les équipes en les rajeunissant, en les féminisant et en les internationalisant. C’est quelque chose que nous allons continuer à faire car cela contribue à la transformation profonde de l’esprit et de l’image de l’entreprise sur le marché.

Quelle approche avez-vous du risque dépendance ?

Nous essayons d’apporter notre pierre à l’élaboration de solutions innovantes. Nous finançons une chaire de recherche dans ce domaine et nous travaillons à développer une offre spécifique pour les aidants. Je pense que c’est une approche intéressante du traitement du risque dépendance.

Quel est l’impact de la guerre en Ukraine sur CCR Re ?

Nous avons assez largement provisionné ce risque dans nos comptes au 30 juin et l’impact sur l’ensemble de l’année devrait être circonscrit à ce qui a déjà été provisionné. C’est un événement de marché important pour lequel nous bénéficions de notre politique de souscription prudente. Nous ne sommes pas touchés au titre du risque aviation car nous ne souscrivons pas de risques de guerre dans cette branche.

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