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Séisme au Maroc, quelle indemnisation pour les assurés ?

Publié le 11 septembre 2023 à 16h17

Mehdi ElAouni    Temps de lecture 4 minutes

L’urgence absolue au Maroc après le séisme du vendredi 8 septembre mobilise les acteurs de l’assurance. Quels sont les enjeux assurantiels liés à cette catastrophe ?

Le 8 septembre à 23h11 heure locale, le Maroc a été secoué par un séisme dévastateur d’une magnitude de 6,8 sur l’échelle de Richter. L’épicentre du tremblement de terre se situait dans la région sud-ouest, à proximité de la ville de Marrakech. Les chiffres préliminaires font état d’au moins 2681 décès et plus de 2400 personnes blessées. Parmi les victimes, quatre citoyens français ont perdu la vie et quinze autres sont blessés. Plus de 300 000 personnes seraient sinistrées selon l’OMS. Outre les victimes, cette catastrophe naturelle a engendré d’importantes destructions matérielles et soulève inévitablement la question de la profondeur du marché dans le royaume chérifien.

Sous-assurance chronique ?

« Les pertes pour les assureurs au Maroc seront bien moindres qu’en Turquie », a affirmé dimanche Jean-Paul Conoscente, directeur général de la branche dommages de Scor, en marge des Rendez-vous de septembre à Monaco. Cela s’expliquerait d’abord par la nature et la réalité des régions les plus sinistrées (Al Haouz, Chichaoua et Taroudant) qui se composent majoritairement de villages nichés au cœur des montagnes.

Nasser Benwahoud, avocat au barreau de Casablanca, précise : « Les régions sinistrées sont pour la plupart des zones rurales très faiblement assurées et assurables – dans la mesure où les constructions sont traditionnelles. » En effet, les trois régions touchées se caractérisent par des habitations construites en terre ou en brique crues, souvent édifiées par les habitants eux-mêmes.

À ce propos, Thierry Léger, directeur général de Scor, a déclaré : « Ces maisons ne sont pas conçues pour résister. Même si les propriétaires envisageaient de souscrire une assurance, il serait complexe de leur proposer une couverture, car il est impossible d’assurer une résidence qui risque de s’effondrer à chaque sinistre, du moins tant qu’elles ne seront pas construites selon des normes précises. »

Un mécanisme déjà en place

Le secteur de l’assurance marocain est un des plus importants en Afrique et a réalisé en 2022 un volume d’affaires global de 57,5 milliards de dirhams (environ 5 Md€) avec une croissance de 9,7 %. La branche de l’assurance non-vie a également affiché une croissance de 6,6 % atteignant un volume de primes de 28,4 milliards de dirhams (2,5 Md€). L’assurance automobile représente 48 % du volume de l’assurance non-vie.

À l’instar du régime français d’indemnisation des catastrophes naturelles (Cat Nat), le Maroc a instauré son propre mécanisme à partir de 2020. Baptisé EV CAT, ce régime vise à indemniser contre les conséquences des événements catastrophiques. En plus de couvrir des aléas naturels tels que les inondations et les tremblements de terre, EV CAT peut aussi être déclenché en cas de terrorisme. Ce régime englobe deux systèmes d’indemnisation distincts : un système assurantiel destiné aux victimes assurées, et un système allocataire pour ceux dépourvus de couverture. Ces derniers sont pris en charge grâce au Fonds de solidarité contre les catastrophes (FSEC). Ce fonds couvre toute personne physique ayant subi un préjudice corporel ou dont la résidence principale a été rendue inhabitable par un sinistre. En 2021, les produits d’exploitation du FSEC se sont élevés à 235 millions de dirhams (environ 22 M€). Nasser Benwahoud souligne qu’en plus, « le gouvernement marocain a créé un fonds spécial pour recevoir les dons, qui va servir à fournir l’aide nécessaire aux victimes ».

En ce qui concerne l’EV CAT, le prix de la garantie est fixé à 8 % de la prime du contrat. L’indemnisation des contrats est plafonnée à 2 millions de dirhams (environ 180 000 €). La franchise représente 10 % du montant des dommages et un minimum de 7 000 dirhams (environ 650 €). Comme avec le régime Cat Nat français, « pour les constructions assurées, il conviendra d’attendre le décret du gouvernement reconnaissant la situation de catastrophe naturelle afin de pouvoir déclencher les garanties », explique Nasser Benwahoud.

Photo : impact du tremblement de terre à Douar Agadir Jamaa, Tizi N’Test, province de Taroudant, 9 septembre 2023, auteur : alyaoum24, licence commons.wikimedia.org

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